WALF a vu…La Belle Saison, un film de Catherine Corsini

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1970.
En France, c’est une période palpitante de luttes et de combats que le premier tiers du film nous conte, porté par ses deux actrices fabuleuses. Mention spéciale pour Izïa Higelin qui est de mon point de vue, remarquable dans son jeu d’actrice, et tout simplement sublime. On plonge avec elles dans une ambiance survoltée, alors que la loi Neuwirth vient de libérer une partie de la sexualité des françaises en dépénalisant la contraception. Il reste tant à faire encore, pourtant… Rendre cette contraception abordable, accessible, lutter contre les mouvements réactionnaires comme Laissez-les-vivre qui soutient encore l’illégalité de l’avortement…

La première partie du film est exaltante, on y retrouve l’ambiance de ces années folles, de cette fuite vers l’avant, on y devine la manière dont les femmes se sont réappropriées leurs sexualité et leurs droits.

reunion feministe sorbonne

La réalisatrice a le souci du détail, et on reconnait le discours « pro vie » du docteur Lejeune, le manifeste des 343 salopes, on baigne dans cette ambiance révolutionnaire. La reconstitution d’une réunion féministe à la Sorbonne est époustouflante de réalisme et de ferveur. Pour enseigner cette partie de l’histoire à mes élèves, des jeunes gens qui peinent à croire qu’il fallait alors se battre et qui ont versé une larme pour Marie Claire, écoutant le cœur battant le déroulé du procès de Bobigny comme si ils y étaient, cette première partie m’a passionnée et ravira en chacun(e) les flammes du féminisme naissant.

La suite de l’histoire se déroule dans le village de campagne de Delphine, interprétée par Izïa Higelin. On y suit l’amour naissant entre cette femme fille de paysans et la parisienne Carole, campée par Cécile de France. Si l’histoire est belle et crédible dans sa forme, je dois bien admettre avoir été un peu déçue par le rythme plutôt lent de cette partie. Heureusement, les personnages secondaires sont époustouflants de justesse, comme Noémie Lvovsky qui joue magnifiquement la mère de Delphine, une femme forte qui voit s’écrouler ce qu’elle croyait acquis et chez qui on devine, parfois, une envie de mieux. Au milieu de la verdure, le drame se joue à huis clos, sans patho, mais avec cette violence inouïe d’un choix impossible à faire, et des habitudes tellement ancrées qu’elles semblent impossibles à déloger (voire ce dialogue superbe sur le salaire des femmes).

baiser parfait

Les scènes de sexe/de nu, dont on a tant entendu parler lors de la sortie du film, sont très joliment filmées, courtes et sans voyeurisme, avec toute la nuance des jeux de lumière sublimant les corps, affichant un parfait naturel dans leur nudité, mais cette justesse de cadrage ne m’a pas empêchée de regretter le manque de passion évidente des images. Les corps sont nus et entrelacés, mais l’ensemble reste froid et lisse, on peine à y croire…

Quel dommage quand on a pu admirer le baiser parfait, filmé en pleine rue, magnifique de délicatesse et de fureur !

La comparaison avec La Vie d’Adele s’impose quand la réalisatrice elle-même en parle : si Kechiche est allé, à mon sens, trop loin dans ses scènes de sexe pour qu’elles soient réalistes, il manque à Corsini un soupçon de je-ne-sais-quoi pour que ce soit crédible…des actrices réellement lesbiennes par exemple ?

La Belle Saison est en tout cas un film à voir, même si on peut en sortir avec des sentiments mitigés, ne serait-ce que pour le cadre historique des idées, pour le naturel éblouissant d’Izïa Higelin, et surtout, surtout…pour se rappeler que tout ce que l’on considère maintenant comme acquis l’a été au prix de luttes qui se poursuivent encore aujourd’hui.

 

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Et en attendant, bande annonce :

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