L’Ex-cuse

Il ne faut jamais recoucher avec ses ex… Voilà la réflexion qui m’a assaillie alors que j’étais… eh bien… que j’avais la tête entre les cuisses de la-dite ex ! J’ai relevé la tête :

– Tu trouves pas ça bizarre quand même ?

Un poing s’est abattu à quelques centimètres de ma tête, sur le matelas, assorti d’un rugissement retentissant.

– Ce qu’il y a de bizarre, c’est que tu penses maintenant à un truc aussi con et qu’en plus tu t’interrompes pour m’en faire part ! T’as vraiment pas changé !

C’est là qu’on a commencé à s’engueuler…

J’ai continué cette réflexion yeux dans les yeux avec mon chat. Pauvre bête, elle ne me prêtait une oreille attentive uniquement parce qu’elle avait faim et que je tenais la gamelle de croquettes hors de portée… Comme je suis cruelle quand une question me taraude…

– Non mais sérieux Noupy ! Tu te rends compte toi aussi que c’est stupide non ? Si c’est une ex, c’est bien pour une bonne raison ! Ok au pieu c’est pas dégueulasse… Mais est-ce que ça fait vraiment tout ?

Il fallait que j’en sois sûre.

Et effectivement, alors que l’ex était en train de pratiquer sur moi une action répréhensible dans de nombreux pays, j’ai finalement trouvé entre deux grognements de plaisir, que cette situation n’était pas viable.

– Pourquoi on fait ça ?
– T’en as pas marre de tout le temps penser ?
– Désolée d’être un minimum intelligente. Si j’avais su que ton type de filles était une abrutie sans cervelle, j’aurai même pas chercher à te draguer !
– C’est moi qui t’ai draguée. T’es trop timide pour ça toi.
– On pourrait revenir au sujet principal ?
– Oh mais qu’est ce que tu es chiante ! Pourquoi on fait ça ? Mais d’après toi ?
– Pour le sexe ?
– Pour quoi d’autre !
– J’en sais rien…
– Cherche pas plus… et ramène ton petit cul par ici !

Cette dernière joute physique avec l’ex me laissa sur le carreau. Je suis restée dormir chez elle pendant qu’elle allait au travail.

Elle est rentrée et je suis partie.

Noupy m’attendait sagement près de la porte, mais j’étais trop fatiguée pour lui faire part de ma pseudo-conversation avec l’ex. Je me suis étalée sur le canapé, et le petit corps lesté de croquettes est venue s’allonger sur moi.

Recoucher avec une ex c’est la solution de facilité tout de même… mais justement, c’est aussi un moyen très simple d’apprécier les petites douceurs de la vie sans se prendre la tête ! Quoique… deux jours de réflexion m’avaient amenée sur mon canapé, affamée, le parfum de l’ex sur les vêtements et des images de son corps dévêtu plein la tête.

Le lendemain après le travail je suis passée voir ma meilleure amie chez elle. Elle déposa devant moi un breuvage approprié aux conversations sérieuses et s’est assise en face de moi en allumant une cigarette.

– Pourquoi on recouche avec ses ex ?

Elle recracha doucement la fumée de sa cigarette et je fus un instant entourée d’un halo laiteux et vaporeux.

– Pour le sexe.

Sa réponse me laissait sur ma faim.

– Tu crois que si toi et moi on avait couché ensemble ça serait différent entre nous ?
– T’es vraiment dégueulasse quand tu as une question en tête toi alors !

Bon elle n’avait pas tout à fait tort, c’est tellement incestueux de penser ça avec elle ! Je décidais d’oublier pendant un instant cette préoccupation et m’abimait dans la boisson… et une compil des années 80.

À minuit et demi, complètement éméchée, je sonnais chez l’ex. Elle m’accueillit, en pyjama, le visage un peu froissé.

– Mais qu’est ce que tu veux encore ?
– Entrer.
– Si c’est pour vomir tu dégages !
– Non je veux parler…
– Oh merde… je sais pas ce que je préfère finalement…

Un verre plein de bicarbonate de soude à la main, je m’affalais dans le plus proche fauteuil, consciente que le sol ne pouvait pas tanguer, sauf dans mon imagination. Elle s’installa en face de moi et me regarda en fronçant les sourcils. Je passais ma main entre ses yeux, pour lisser ce front soucieux. Je l’entendis soupirer.

– Tu veux dormir ici ?

Je me levais pour partir, un peu offensée qu’elle m’ait crue saoule, mais manquant de me manger un mur, j’acquiesçais finalement.

Elle me déshabilla à gestes doux et m’allongea à côté d’elle dans le lit. Je lui demandais d’une voix pâteuse :

– Vu que je suis là… Tu veux qu’on baise ?

Une gifle puissante me dessaoula presque.

– Dors ! Et que je ne t’entende plus me proposer de baiser. Tu sais bien que j’ai toujours considéré ce mot comme irrespectueux.

Et j’ai senti qu’elle me tournait le dos.

Là, c’est un des instants dans une vie où on se sent particulièrement nulle. Et puis à ce moment là j’ai compris.

– Hey…je t’aime.

Un froissement de draps plus tard et je sentais sa bouche contre la mienne.

– Moi aussi imbécile…