[Le sexisme se cache dans les détails] Babysitting et prise de consicence, ou la parentalité pour les nul.le.s

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Tu commences à t’apercevoir que tu vieillis quand tes copines te plantent pour les sorties en soirée goudou parce qu’elles n’ont pas pu joindre leur babysitter, ou encore quand, pour un resto entre copines, tu réalises qu’il y a presque autant d’enfants autour de la table que d’adultes. Dans ces cas-là, arrive immanquablement le moment où tes amies t’invitent plutôt à venir prendre l’apéro, au pire, tu sortiras plus tard. Toi, t’es jeune, enfin, toi, tu n’as pas à gérer le bain à 20h sonnantes ou la vaseline à mettre sur le bobo sur l’arcade parce que le médecin a dit que ça cicatriserait mieux.

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Disons, tu n’as pas à le gérer sauf que t’es une pote en or. Le genre à accepter de garder les deux petits princes de trois ans et demi toutes les semaines pour permettre à leur maman passer du statut d’homoparent à celui de soloparent à la suite du premier divorce lesbien que tu connais. D’ailleurs, tu n’as pas été à beaucoup de mariages lesbiens alors des divorces… mais il y a eu le divorce. Et une soloparent, ça n’a pas une vie facile. Donc, en bonne amie, tu t’es proposée pour garder les mômes le jeudi soir. Tous les jeudis soirs.

Quand les seuls enfants que tu fréquentes sont des adolescents de seize ans que tu ne vois que quatre heures par semaine pour leur apprendre à analyser du Camus, c’est pas forcément simple de s’occuper de jumeaux de trois ans et demi. Et on n’imagine rarement l’énergie et l’ingéniosité des enfants de cet âge-là. troispetitscochonsPar exemple, tu ne pensais pas qu’un jour tu te cacherais pour hurler à la mort dans la cuisine parce qu’ils sont accros aux Trois Petits Cochons de Walt Disney et que vous jouez à chasser le grand méchant loup qui a décidé de vous attaquer à la fin du repas. Tu ne pensais pas non plus te rappeler les comptines que te chantaient tes parents quand tu étais petite, mais tu te retrouves à enchaîner les “Il était un petit homme, pirouette cacahuète” et autres “Gentil coquelicot” parce que tu ne sais pas comment faire pour qu’ils arrêtent de courir partout. Et clairement, il y a six mois tu ne pensais pas qu’un jour tu finirais par connaître par cœur des albums jeunesse entiers. Les enfants, ça demande d’avoir de la ressource. Clairement.

L’autre chose difficile, c’est de savoir comment réagir quand ils te disent “Avec maman, on fait ça etc.” Et encore, ça, c’est easy, par rapport à “Avec X, [insérer là le prénom de l’ex de ta pote], on a le droit à ci ou ça”. Pire encore, le cri aigu qui réclame l’autre maman. Et si à ce moment-là tout ce que tu as à répondre, c’est qu’il n’y a que toi, là, sur le moment, et que la règle, faute de mieux, c’est toi qui la fixes, alors, tu n’es pas sortie de l’auberge. La question des limites, des règles à poser, pour toi en général, c’est de l’ordre de l’abstrait. Tu t’interroges sur ce que tu feras toi, quand/si un jour tu décides toi aussi de te lancer dans cette grande aventure de la maternité. Mais peu à peu tu te rends compte, que même si ce n’est que quelques fois par-ci ou par-là, ces questions surgissent de manière inopinée. Pas du tout au moment où tu théorises ton rapport à une éventuelle future maternité, au chaud sous la couette dans les bras de ta chère et tendre, ou pendue au téléphone avec elle. Là, ça devient concret. Il faut prendre une décision : céder ou pas au caprice pour avoir la paix ou pour gérer (encore !) sur l’instant.

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Il y a des moments où babysitter deux petits garçons relève du manuel d’apprentissage des règles de la parentalité, et d’autres où ça ressemble à un puissant remède à toute envie d’éduquer tes propres enfants. Effectivement, ces moments où tu te sens complètement impuissante ou dépassée, ce n’est pas nécessairement simple. Et là, tu repenses à tous les magazines qui traînent dans les diverses salles d’attente que tu fréquentes. Le guide de la maman parfaite, c’est une belle connerie. Tu penses aussi à l’article de Trinity qui parle des conseils-à-la-con qu’on te donne quand tu deviens parent. Toi aussi, tu y serais allée de ton petit commentaire innocent. Si j’étais à ta place, je ferais …

Quand tu as à ta charge des petits bouts, même pas longtemps, même occasionnellement, tu réalises que tout ce que la société impose de contraintes sur les mères est terrible. Le poids de la norme sociale et de l’injonction à être la meilleure maman possible est incroyablement lourd. Et nous sommes toutes empêtrées dans des représentations forgées à grand renfort de contes, d’histoires de méchante marâtre, de dessins animés où maman prépare le repas tandis que papa répare le vélo. Cette rage d’être une mère exemplaire me semble encore plus forte pour les couples de femmes.

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Dans mon entourage de mamans lesbiennes, les avis divergent, mais beaucoup me répondent qu’être un homoparent, c’est avoir l’impression de devoir atteindre la perfection, de fait, tout le monde a un avis (et s’empresse de le donner) sur ton droit à élever un enfant, sur la façon dont tu peux enfanter, sur ton couple, ta famille, j’en passe et des meilleures. Pourtant, comme dirait l’une d’elle, on fait comme tout le monde, ni mieux, ni pire, et la sexualité n’a rien à voir là-dedans. On n’a rien à prouver ni à montrer. Comme toutes les femmes en somme, sauf que le poids des représentations pèse toujours un peu plus quand on cumule les handicaps sociaux !

2 COMMENTAIRES

  1. Et pourtant… Ils auront tellement plus ces petits culs là. Comme la possibilité d’être qui ils ont envie d’être et de choisir leur sexualité ou leur genre, enfin j’espère. J’espère que les homoparents auront cette lucidité et que la peur potentielle de devoir prouver d’être aussi bien que les hétéroparents, ne prendra pas le pas. Nous sommes différents, vive cette différence ! Il ya tellement à dire sur ce sujet… A plus dans un post dédié 😉

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