Les soirées des copains…des gens d’avant

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Tu connais sûrement le concept des soirées des anciens élèves «alumni ».
Ce genre de soirées consiste à faire se réunir tous les anciens élèves d’une promotion de classe juste le temps de pouvoir observer combien on a tous changé – ou pas. C’est ce OU PAS surtout qui semble terrifiant.

Ainsi j’ai eu le plaisir de découvrir que L. avait pris beaucoup de poids, que G. était mariée à ce gros con de P. et que T., M., et M. étaient toujours les meilleures amies dans le meilleur des mondes, et surtout qu’elles étaient toujours aussi superficielles.

Moi, j’avais fait un effort. J’étais venue ici par accident, le bar était sympa, j’avais envie de montrer ma gueule, je me sentais vraiment bien dans ma peau, dans mon corps : j’avais envie de bavarder, de boire et de danser ! C’était samedi soir après tout.
J’ai mis du temps à comprendre que tous n’étaient pas venus ici pour les mêmes raisons. Je n’ai mesuré l’horreur de la situation qu’au moment où mon voisin de comptoir a prononcé cette phrase : « Il y a là toutes les personnes que je m’étais promis de ne plus jamais revoir ».

Soudain j’ai repensé à mes années collège et lycée, les soit-disant « meilleures » de l’existence. J’ai repensé à la boom de mes 15 ans où je m’étranglais en souffrance devant les poitrines de mes amies, prétendant activement suffoquer devant les pectoraux indiens du prof de sport. J’ai repensé à ce jeu que j’avais inventé dans la cour en troisième qui consistait grosso-modo à rouler des pelles à toutes mes amies.
A cette époque, je me résume en cette expression : je suis une boule de frustration.

Dans cette soirée, il y a J. : il est beau, il est grand, réservé, intelligent. J. et moi on a eu une histoire. Une histoire d’amour d’enfant. Je danse et je virevolte en toute inconscience près de J. sans analyser le message que j’envoie aux autres convives.

Plus tard, encore radieuse et confiante, je continue ma course aux nouvelles et j’enchaîne les « oh ! ce que tu as changé ! », « je ne t’aurais jamais imaginé avocat/médecin/prof/psychologue … ».

C’est comme un pic glacial qui me transperce lorsque qu’on me demande : « et alors avec J. vous avez un projet bébé ? »

J’ai simplement répondu que non, pas de projet bébé, et je me suis enfuie vers mon voisin de comptoir.

Dans ma tête ça clignote sous fond sonore strident : Au placard !!!!!! T’es au placard !
Et je n’ai juste simplement pas le courage, pas la force, pas l’envie de leur expliquer.

OUI, j’ai changé, et non je n’ai pas changé. Je me revois gamine, à essayer de faire consensus, à essayer d’être correctement ce que je me devais d’être.

Finalement, j’ai quitté la soirée en me disant que vraiment, si moi j’étais redevenue la copine peureuse et lâche qu’ils avaient connu,

c’était vraiment une soirée des gens d’avant, et je ne suis pas peu fière de ne plus être esclave du temps d’avant.

F.

Quand on vous disait que nos lectrices ne manquaient pas de talent…

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