Comment définir la culture gay ?

Si tu rappes comme Nicole Croisille, si tu prends un RTT pour te préparer à sortir en soirée, si tu connais les livres qu’on ne lit que d’une main, si les jeux de mots tendancieux squattent ton esprit, si tu crois que le dégraffage de soutif devrait être une discipline aux JO, si prononcer LMPT te fait rire, merci de prendre contact avec Mme Boutin pour un désenvoûtement. Si en sus (hihi, c’est plus fort que moi) tu as déjà prononcé « En attendant Goudou » sourire en coin, là on peut plus rien pour ton âme. Hymen mes sœurs, priez pour nous pauvres pécheurs.

Ton panthéon culturel est gavé d’Oscar Wilde, de Dalida, de Rimbaud et de Ab’ Fab’ en pagaille. Le disco et le design partouzent allègrement dans ton musée imaginaire et le kitch drague la tendance sans vergogne, alors il y a des chances que :

  • Tu sois drôlement intelligent
  • Tu sois drôlement intelligent
  • Tu sois gay éventuellement, friendly sûrement !

Cela dit, est-ce que être gay suffit à se créer une culture commune ?
Ça paraît con comme question tellement certains films, certaines stars, des séries, des modes sont classés rayon gay. Ce qui était autrefois honteux deviendrait un argument de vente, une caution de hype.
Les vedettes grattent à la porte du club select des icônes lgbt. Les homos sortent et consomment la culture, c’est un public en or hein. Lady Gaga me disait encore hier sur Skype à quel point elle nous devait beaucoup. Faut les voir les chanteuses en perte de vitesse se rouler des galoches entre elles ! On se souvient certes avec émotion de la pelle entre Britney et la Madonne, mais franchement, Shy’m et Noémie Lenoir, on s’en fout non ?

Il se pourrait bien qu’on nous prenne pour des vaches à lait. Les médias adooooorent taxer telle diva en string ou tel mannequin creux de culte pour notre communauté en espérant que les hétéros se disent que si on aime ça doit être des valeurs suûres.
Ils n’ont pas compris que nos véritables héros n’ont rien calculé. Que bien souvent, ils ont pris des risques pour se montrer sous leur vrai jour. Demande à M. Wilde si ces 2 ans de bagne c’était une thalasso. Marlene Dietrich et Greta Garbo, vous croyez que Hollywood était fan de leurs galipettes ? Et Verlaine qu’a pas su tirer Rimbaud… comme un lapin. J’en ai le gaydar culturel qui frétille.

Quoi qu’en pensent les hétéros jaloux qui, noyés dans la masse, n’ont pas leur culture à eux, nos artistes de cœur, nos icônes intimes ont parfois payé cher leurs goûts des arts et des êtres. Ce n’est pas (uniquement) le côté paillette ou folle qui créé une star « gay ». C’est davantage le côté outsider, la face sombre qui fait d’eux des idoles dans le jardin secret de milliers d’ado en recherche de modèle valorisant.

Laissons le romancier Dominique Fernandez conclure avec classe :« La permissivité tue l’art. Etre homosexuel, ce n’est pas uniquement préférer les personnes de son sexe, mais aussi se tenir en marge, penser différemment, être un ferment critique dans le consensus environnant. Si la société nous récupère, risque de disparaître ce sentiment d’être paria qui aiguise tant la sensibilité. La vie privée sans doute y gagne ; mais l’artiste y perd en énergie. »

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Illustration @mdessine, texte DiXie

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