Détournement d’Hétéro

Coucou les filles !

Quand j’ai commencé à discuter avec les WALF, elles m’ont dit que ça pourrait être sympa que j’écrive quelques articles pour livrer le point de vue d’une hétéro. Sauf que je ne voyais pas vraiment ce que je pourrais dire en tant qu’hétéro de service surtout que je ne porte pas franchement mon orientation sexuelle en étendard. J’ai donc demandé des idées de sujets. Et une des questions qui m’a été posée m’a particulièrement fait marrer ! Et intriguée aussi…

« Pourquoi est-il si facile de faire tomber une hétéro quand on est une fille ? Le désir d’aventure ? »

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C’est une réalité dont je n’avais pas connaissance parce que le monde homosexuel, en particulier féminin, est très opaque pour les hétéros. La seule partie émergée de l’iceberg que nous pouvons voir – si nous ne nous y penchons pas plus que ça – se trouve dans les films, en particulier pornographique. Et il faut dire que la représentation y est franchement biaisée !! (Comme la représentation des rapports hétéro d’ailleurs !) Je n’avais donc pas conscience qu’une femme hétéro était facile à tenter. D’autant plus qu’au final, je ne me sens pas vraiment concernée par ces catégorisations. Je suis plutôt hétéro mais pas par choix. Je suis hétéro parce que c’est comme cela que ma libido agit et réagit la majorité du temps. La majorité, car je fais partie de ces personnes suffisamment ouvertes d’esprit pour ne pas trop m’embarrasser de cela et pour saisir les occasions comme elles viennent. Mais si ma libido ne connait pas ces limites, mon cœur, lui, a ses préférences. Et il ne s’est emballé que pour des hommes jusqu’à présent. Je suis donc généralement «rangeable» dans la case « hétéro » et, en plus, on peut me rajouter l’étiquette «cis-genre» parce qu’à la grande honte de mes convictions féministes, j’ai le mauvais goût d’être « féminine ». C’est pour cela que j’ai accepté, pour l’occasion, de revêtir le costume de l’hétéro de service et de me prêter, de bon gré, au jeu des questions. Ce sera ma façon d’expier mes fautes. Je réciterai 3 Simone de Beauvoir et 4 Virginie Despentes pour l’occasion, tout en me flagellant d’orties ! :p

Face à cette superbe question, je n’ai pu qu’humblement aller chercher des informations.
Car, malgré mon engagement et mes rapprochements avec le milieu LGBT, ce n’est pas ma réalité.
Me voilà donc dans la position de tous ces hommes qui veulent parler de féminisme. Et je leur reproche assez souvent de faire du mansplaining pour être moi même vigilante à éviter le straightsplaining !
J’ai donc commencé par écouter l’expérience des principales concernées. Si les filles de WALF me disent que les hétéros sont faciles à détourner, je ne peux que les croire sur parole. C’est leur réalité, pas la mienne. Par contre, ce que je peux faire, moi, c’est essayer de comprendre pourquoi. À partir de ce que je peux voir de mon monde d’hétéro.
Par curiosité, j’ai ensuite cherché à savoir si cette réalité avait été observée par d’autres. Et j’ai trouvé plusieurs chiffres très intéressants :
D’après une étude effectuée par la « Boise State University », 60% des femmes hétérosexuelles trouvent d’autres femmes sexuellement attirantes, 50% ont déjà fantasmé sur une autre femme, et 45% ont déjà embrassé une femme sur la bouche. Cette enquête nous apprend aussi que le fantasme de l’homosexualité féminine aurait tendance à éclore avec les années.

11909707_10153559709830761_1950281870_nUne autre étude de l’université de l’Utah a montré que beaucoup de femmes en mûrissant avaient tendance à répondre « non déterminée » au sujet de leur sexualité au lieu de « hétérosexuelle ». « Nous avons cette idée fausse que l’orientation sexuelle devient plus claire et plus définie à mesure que les années passent », explique la psychologue Lisa Diamond au Daily Mail, « […] mais j’ai pu constater que c’est exactement l’inverse ». Oui, enfin, moi, j’aurais plutôt tendance à dire que ça se détermine de mieux en mieux avec l’âge mais en s’ouvrant à de nouvelles possibilités. L’ouverture d’esprit vient peut être avec la maturité.
On apprend également, grâce à une étude canadienne, publiée dans la revue scientifique « The Journal of Sexual Medicine », que les femmes interrogées sont 36.9% à fantasmer une relation homosexuelle contre 20.6% seulement d’hommes.

Je pense qu’il y a là de précieux éléments de réponse. J’ai souvenir que quand j’étais une jeune ado rebelle, et que je sortais en boîte, avec les copines on faisait semblant d’être en couple et on s’embrassait sur la bouche dès qu’un garçon s’approchait de trop prêt. Cela ne nous dérangeait pas, bien que ce n’était pas nos tendances. Je me souviens aussi que j’ai vu d’autres amies jouer sur des sous-entendus d’homosexualité pour, au contraire, chauffer des garçons. Par contre, j’ai également de très clairs souvenirs des blagues homophobes entre garçons et de la façon dont la présomption d’homosexualité masculine était insultante (d’ailleurs l’homophobie ordinaire existe malheureusement encore). Je crois donc qu’il y a, du côté des femmes, moins de tabous liés à l’homosexualité ou du moins à une expérience homosexuelle. Même si, en réalité, les hétérosexuelles voient l’homosexualité féminine comme un préliminaire aux rapports hétéro ou pas vraiment comme du sexe. Les hommes sont nombreux à rêver de coucher avec deux femmes bies ou même « lesbiennes » car ces messieurs, bien patriarcaux, ne considèrent de toute manière pas vraiment l’homosexualité féminine comme telle. Le fameux cliché sexiste de la lesbienne qui attend juste de rencontrer un « vrai » homme. Les films pornos exploitent d’ailleurs ce filon à fond ! Les films et séries n’hésitent pas non plus à évoquer la sensualité lesbienne. Alors qu’il est nettement plus rare qu’on voit des scènes érotiques entre garçons dans des films ou séries grand publique.

Les rapports homosexuels féminins sont vus, par les hétéros, comme des « préliminaires ». Parce qu’on y pratiquerait – attention je vais exposer une représentation hétéronormée – « uniquement » des caresses et des jeux de langues. Ce que les hétéros appellent dans leurs relations des « préliminaires » et qu’ils et elles ne considèrent pas vraiment comme du sexe (ce qui en soit est imprégné d’idées fausses et sexistes). Puisque dans le monde de l’hétéronormativité, le sexe c’est quand un pénis rentre dans un vagin. Pour une femme hétérosexuelle, faire l’amour avec une femme ce ne serait donc pas vraiment faire l’amour. Et je pense que cette représentation doit aider à évincer la culpabilité ou doit éviter de se poser trop de questions. C’est donc tout à l’avantage de lesbiennes qui voudraient faire succomber une hétéro 😉

Pour répondre à la question « Pourquoi est-il si facile de faire tomber une hétéro quand on est une fille ? », j’aurais donc tendance à proposer ces trois hypothèses :

– Des fantasmes homosexuelles du côté des femmes hétéros
– Moins de stigmatisation de l’homosexualité féminine que masculine (même si ça va avec des clichés plein de déni)
– Et une vision de la sexualité lesbienne comme n’étant pas vraiment du sexe donc pas vraiment impliquant corporellement.

Et si vous avez bien suivi… apparemment, plus vous serez patientes, plus les hétéros devraient être faciles à détourner. Puisqu’il semblerait que la sagesse homosexuelle s’acquière avec les années. Alors si vous avez une hétéro en vue : « Patience et longueur de temps… » les filles 😉

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